Je me promène et je regarde... Mais voici, derrière un petit mur, à deux pas de moi, un bout de chiffon doré qui brille et qui remue, puis qui monte doucement, doucement, avec des précautions infinies : une hantouze de femme!
Je ne bouge plus, subitement pétrifié... La coiffure dorée monte toujours... des cheveux, un front, des sourcils noirs! deux grands yeux qui m'ont vu !! Coucou! c'est fini... Disparue, la belle, comme à guignol, une marionnette qui retombe...
Je reste là cependnat, devinant bien qu'elle n'est pas partie... Et en effet, de nouveau voici l'hantouze qui monte, qui monte, puis toute la figure, cette fois paraît et effrontément me regarde, avec un demi-sourire de curiosité scandalisée... Elle est charmante cette voisine, entrevue dans ce mystère.
Puis j'aperçois une figure nouvelle, une grande jeune fille brune, tête nue avec de longues tresses de cheveux admirables; d' où vient-elle cette recrue? ... Un profil droit et dur; des yeux très allongés, à peine ouverts, obscurs et sensuels; un air hautain, un air sauvage; son bras qui est nu, serait à lui seul une merveilleuse chose à sculpter ou à peindre.
Après une minute de frayeur, elle prend, elle aussi, le parti de me regarder en face, semblant me dire : "Qu'est-ce que tu fais-là? Pourquoi viens-tu gêner les femmes, dans leurs domaines des toits?" (Pierre Loti " Au Maroc" 1890)
Aucune femme sur les terrasses lors de mes visites sur les toits, mais une forêt d'antennes. Les temps changent ou alors je n'y étais pas au bon moment.